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Toutes les informations et articles concernant les Tournois d’échecs organisés par l’Échiquier Club Créonnais.

Les Créonnais au 55e Championnat de Bordeaux

Les Créonnais au 55e Championnat de Bordeaux

Par Jean-Michel Labourdique

Jeudi 29 mai 2025

L’homme providentiel

C’était une belle nuit de Juillet. On donnait « Rigoletto » au festival d’opéra de Soustons. Après la représentation, je partageais une orangeade avec Rigoletto au bar de la salle de spectacles.

Jusqu’à mes 30 ans, je tenais l’opéra pour un truc de bourges, plutôt ridicule. Mais j’étais ingénieur de travaux publics, et on devait rénover les plafonds de l’opéra de Toulouse. Un beau matin, j’entre et je vois mes gars qui travaillent sans harnais de sécurité. Aussitôt, je pousse une gueulante de première, à faire trembler les vitres. Le directeur des chœurs de l’opéra de Toulouse passait à ce moment là :
– Quelle belle voix, a-il lancé.
Et voilà, j’avais mis les doigts, ou plutôt la langue, dans l’engrenage !
Un an après, je chantais Germon dans « la Traviata ».

Les échecs, c’est la même chose. Une rencontre humaine nous a jetés dans cette aventure magnifique. Pour Mathieu Cornette, champion de France, ce fut le directeur de son école primaire. Pour moi, ce furent Josiane Balbi et Yves Daudu qui, entre la plongée du matin et celle de l’après-midi, partageaient avec moi le seul échiquier de l’île Pomègue. Et, quand je croise Arthur en tournoi, comme aujourd’hui, je suis très flatté quand il me rappelle que le gars qui l’a confirmé dans sa vocation de joueur, c’est moi. J’avais alors superbement perdu ma partie devant le petit garçon qu’il était.

À la ronde 1, je n’ai eu que le temps de faire un signe amical à Arthur avant d’entamer une partie très disputée et mal finie. Non loin de moi, Ulysse a dû plier devant la Sicilienne du père de mon adversaire. Par contre, Maxime a fait fructifier ses deux pions d’avance, en échangeant intelligemment les pièces. Et Jean-Philippe, avec sa Dame et son Fou en batterie, a pu infliger le baiser de la mort au Roi adverse, prisonnier de son roque.

À la ronde 2, beaucoup ont perdu. Samuel, Jean-Philippe, Ulysse, moi… Mais, après un Gambit Dame refusé, Maxime a gagné et pris la tête du tournoi. Je suis allé fêter sa victoire au Bar des Citernes avec Wesley et nous avons bu une bonne orangeade. Wesley n’était pas venu jouer le matin pour, selon ses dires, « préserver une bonne qualité de sommeil ». E il débordait de vitalité.
– Joue simple, tu gagneras, a-t-il dit.
J’ai suivi son conseil à la ronde 3. Merci Wesley, tu avais raison.

Vendredi 30 mai 2025

Le Messerschmitt

C’était dans les années 80. Je fréquentais un club de plongée à Marseille.

– On va plonger sur l’épave du Messerschmitt, à -53 mètres, avait dit Michel. Ne faites pas les zozos avec les paliers de décompression !

Nous nous étions ennuyés comme des rats morts. À -53 mètres, la lumière du soleil n’arrive pas, et ce bout de ferraille guerrière baignait dans une vase privée de vie, à côté d’une bouteille de pastis. La remontée avait été interminable et soporifique.

Épave du Messerschmitt BF109 au large de l’Île du Planieren en Méditéranée

Pendant ce temps, les camarades restés en surface, en palmant simplement dans les calanques, avaient recensé par -30 centimètres des nudibranches magnifiques. Les nudibranches sont des starlettes multicolores et magnifiques de la mer !

Aux échecs, c’est la même chose. Le joueur peut suer sang et eau pour des résultats stériles. Et son camarade, à côté, verra un coup insouciant superbement récompensé.

Tel a été le cas ce matin. Maxime, après avoir dépensé des trésors d’ingéniosité, a dû se contenter d’une nulle qui n’a satisfait aucun des deux adversaires. Et, sur un autre échiquier, Samuel a joué avec le même bonheur jubilatoire et insouciant qu’un pâtissier qui fait une tarte aux pommes, et la victoire était au rendez-vous.

Samedi 31 mai 2025

Les Malvacées

Au XVIIIe siècle, le botaniste suédois Linné eut une idée originale : apparenter les plantes selon la ressemblance de leur système floral. C’est ainsi que le gigantesque baobab se retrouva proche parent de la petite fleur timide qu’est la mauve Et on est désormais obligé de les placer à la même table au repas de mariage de tatie Marie-José, la table de l’Ordre des Malvacées.

Aux échecs, c’est la même chose. On commence par une ouverture sanglante, votre adversaire joue un coup inattendu, et voilà obligé de transposer dans une ouverture pépère. La possibilité de cette transposition apparente alors deux ouvertures à priori aussi étrangères que la mauve et le baobab.

Les échecs, c’est la guerre, a-t-on dit. Eh bien, comme à l’armée, il est parfaitement possible de s’engager dans les commandos-marine, et de se retrouver le lendemain aux cuisines. Tout ça par la magie d’une transposition.

C’est ce qui m’est arrivé ce matin à la ronde 6. J’étais parti à l’abordage avec une Sicilienne. Mon adversaire m’a obligé à transposer. Je me suis alors retrouvé dans un truc gentillet qui ressemblait à une Anglaise, et il m’a eu à l’usure.

Pendant ce temps, Maxime gagnait grâce à une fourchette diabolique de son Cavalier. Samuel s’est magnifiquement battu avant de s’incliner. Wesley a gagné grâce à ce qu’il appelle « L’ouverture d’Emma », un Gambit Morra*, encore plus meurtrier que la « Pseudo-Rossolimo ». L’adversaire de Jean-Philippe a sacrifié une Tour dans un mouvement splendide qui a rendu toute défense impossible, mais Jean-Philippe a ferraillé jusqu’au bout.

L’après-midi, Wesley, après une méditation infructueuse de 25 minutes, a proposé la nulle, et l’a obtenue. Moi, j’ai conquis rapidement sur l’échiquier un empire immense, trop immense pour que je puisse le conserver. Et tout s’est effondré à la première contre-attaque. Samuel a gagné. Maxime a dû céder la qualité dès le début et sa défense s’est vite effritée. Ulysse et Jean-Philippe jouaient toujours quand je suis parti.

Dimanche 1er juin 2025

Juju

En 1955, Claude Lévi-Strauss termine son superbe livre Tristes Tropiques par une déclaration d’amour à son matou qui le regarde écrire. L’écrivain est heureux, « dans le clin d’oeil alourdi de patience, de sérénité et de pardon réciproque, qu’une entente involontaire permet parfois d’échanger avec un chat ».

« Regarde ton bureau… Quel bazar ! »

Ce soir, Juju, mon gouttière noir et blanc, me regarde refaire les parties de la veille, avec la même sérénité.
– 1.e4 b6 2.c4 Fb7 3.Cc3 e6 4.Cf3 Fb4. Le début est correct, hein, Juju ?
– Tu commences bien, mais après, ça part en sucette, répond Juju. Tu n’as pas de plan.
– Comment, pas de plan ? Je prends l’espace !
– Non, tu t’étales, tu en mets partout, c’est différent. Regarde ton bureau, c’est la même chose, quel bazar ! Et jouer 13.Cd1, c’est minable.

Les autres Créonnais ont-ils un Juju chez eux pour analyser leur partie, ou font-ils confiance à la bête informatique ? Je ne sais pas. Pour conclure, voici quelques mots sur la dernière journée.

À la ronde 8, l’adversaire de Maxime a abandonné une Tour pour gagner un Cavalier et deux pions… Match nul pour finir, mais quelle belle partie !
Ulysse s’est courageusement battu dans une finale de Tours et de pions pleine de panache. La victoire n’était malheureusement pas au rendez-vous.
Quant à moi, j’aurais dû me méfier du Corbeau qui m’a accueilli sur le parking, alors que d’habitude, sur les friches de la gare Saint-Jean, on ne voit jamais que des pigeons. Les messagers d’Odin sont rarement de bons présages. Après m’avoir hurlé un croassement indigné, il a pris son envol et m’a abandonné devant la salle de jeu où mon adversaire, très sympathique, m’a exécuté en peu de temps. Malgré son nom, K. Holin, ce n’était pas un géant aux pieds d’argile.

Après la ronde 9, c’est le moment de faire le bilan !

Wesley, Maxime et Jean-Philippe ont fait des parties magnifiques. Samuel et Ulysse ont encore montré leurs progrès, et on peut prévoir que bientôt ils battront leurs aînés.
Mais tous, par leur sportivité et leur bonne humeur, on fait honneur au Club de Créon.
Un grand merci à eux ! Et j’associe à ce merci tous les parents.

À bientôt, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes !

Jean-Michel Labourdique


55e Championnat de Bordeaux organisé par Bordeaux ASPOM Échecs du jeudi 29 mai au dimanche 1er juin 2025.

Fiche du tournoiClassementGrille américaine


(*) Le Gambit Morra ou Gambit Smith-Morra est le nom d’une ouverture aux échecs. C’est un gambit des Blancs contre la Défense Sicilienne. Il s’obtient après les coups 1.e4 c5 2.d4 cxd4 3.c3. Cependant, on considère également que les coups 1.e4 c5 2.d4 cxd4, quel que soit le troisième coup joué, constitue déjà le Gambit Morra. Cette ouverture tient son nom des joueurs français Pierre Morra et américain Ken Smith. Les Blancs sacrifient un pion pour obtenir une avance de développement et de bonnes chances d’attaque. La compensation obtenue par les Blancs pour le pion d est le développement d’une pièce supplémentaire et d’un pion central après 4.Cxc3. Quant aux Noirs, ils bénéficient d’un avantage matériel et d’une majorité centrale. L’idée pour les Blancs est ensuite de placer leur Fou de cases blanches en c4 pour attaquer la case f7 naturellement faible. Puis ils tenteront de contrôler les colonnes c et d avec leur paire de Tours en tirant avantage de la difficulté des Noirs à trouver une bonne case pour leur Dame.


Les Créonnais au Tournoi de Marmande

Les Créonnais au Tournoi de Marmande

Par Jean-Michel Labourdique

– Pourquoi tu ne mets pas le GPS ? a dit Eliote depuis le siège arrière.
– J’ai horreur qu’on me dicte ma conduite, ai-je répondu. Par contre, lire une carte, c’est tout de suite l’aventure. Tu as trouvé Fourques-sur-Garonne, Leo ?
– Non, a dit mon copilote, empêtré dans les kilomètres-carrés du « Gironde-Lot-et-Garonne » de Michelin, imprudemment dépliés.
– La carte, ai-je dit, foisonne d’informations passionnantes. On peut même y trouver la déclinaison, l’angle qui différencie le nord magnétique du nord géographique. C’est très utile aux marins.
– Pourquoi un navire viendrait-il dans le Lot-et-Garonne ? a dit l’un d’entre nous. Néanmoins, Leo a abandonné la recherche de Fourques pour la recherche de la déclinaison. Nous sommes cependant arrivés à l’heure à Fourques pour un tournoi magnifique.

De leur côté, les passagers du vaisseau spatial hyperconnecté de Pierre sont également arrivés dans les temps. Ainsi que les passagers de la voiture de Wesley, unanimement écœurés par le rap français aux paroles incompréhensibles qui fascine notre président.

Treize !

En comptant l’arbitre, notre copain Fred, nous étions treize ! Mais, sans faute d’orthographe, nous étions également neufs, car la fraternité magique des échecs nous rajeunissait. Et chaque ancien se sentait aussi adolescent que les collégiens qu’il accompagnait.

À la ronde 1, la dernière partie à finir fut celle de Maxime et Leo, avec un combat final d’une Dame contre deux Tours. La victoire revint à Maxime.

À la ronde 2, Emma a clôturé sa Sicilienne par une traque du Roi blanc qui s’est achevée par la mort du monarque au centre de l’échiquier. Pendant ce temps, Maxime, tout en exécutant Pierre, notait tranquillement ses coups, en partie rapide ! Gauthier, de son côté, a joué la variante Tarrasch de la Française, qui lui a donné la victoire.

À la ronde 3, Eliote a obtenu la nulle après une jolie Est-Indienne. Nulle aussi pour Wesley, face à Jean-Philippe, par triple répétition de la position.

À la pause de midi, Wesley a dit « trop de pâté tue le pâté », en mordant dans son sandwich. Emma a fait l’éloge des bergers australiens. Leo a prêté sa béquille pour récupérer le frisbee qui était sur le toit.

À la ronde 4, Leo a battu Luther en finale. Un petit pion de plus a fait la différence. Emma a placé un magnifique Cavalier-pieuvre en e4. Gauthier a accepté le gambit sur une Viennoise : Victoire !

À la ronde 5, Maxime a bien maîtrisé des échanges qui lui ont permis d’aborder la finale avec des pions invincibles.

Après la ronde 6, nous nous sommes tous regroupés au bord du canal latéral à la Garonne, où nous avons vu passer une énorme péniche, qui justifiait à elle seule l’existence de la déclinaison sur la carte du Lot-et-Garonne.

– C’est beau, l’eau qui coule, a dit Wesley, qui avait absolument besoin de faire le vide.

Retenons, à la ronde 7, la belle victoire de Luther, le roi de la fourchette, face à Eliote.

Le bilan

Wesley, vainqueur du tournoi !
Maxime, qui a battu de gros Elos, médaille de bronze !
Emma, meilleure féminine !

Quelques Créonnais heureux de leur journée !

Gauthier, pour terminer, a fait un bilan personnel que nous pouvons tous adopter, je crois : « Je suis déçu et content. Déçu par mes étourderies, content de mes belles parties ! » Il a raison.

À bientôt, les futurs Carlsen !Mangez des pâtes !

Quelques Créonnais heureux de leur journée !

Jean-Michel Labourdique

3e Rapide de l’Échiquier Marmandais – Dimanche 18 mai 2025

Fiche du tournoiClassementGrille américaine

Le « Je » de la Dame

Le « Je » de la Dame

– Sacré tournoi, commenta Denis, en revenant au parking après la remise des prix.

– Ouaip, répondit laconiquement Laurent, dit « la Gattègne ».

Mes deux copains de l’Aviron Bayonnais, que j’héberge pendant l’Open de Saint-Macaire, ont raison. Sacré tournoi. Certainement le seul en France, où l’organisateur, notre ami Tristan, prend le temps entre deux rondes d’improviser, pour les joueurs d’échecs amoureux d’histoire et de géographie, la visite pédestre de sa petite ville magnifique. Le seul en France où les joueurs peuvent se régaler à la buvette des fameuses « tartes aux pommes ». Le seul enfin où les toilettes sont si rares, mais l’ambiance si cordiale, qu’on devise chaleureusement en faisant la queue, comme des supporters de rugby au guichet du stade… Bernard Dubertrand, de l’Échiquier Montois, a mis 46 minutes pour parcourir les deux étages qui mènent à la salle de jeu. À part quelques exceptions, les joueurs d’ échecs sont des orateurs, et chaque marche d’escalier leur est une tribune.

Je ne veux pas distinguer, au dernier soir de ces trois jours de compétition, qui furent les gagnants et les perdants. Tout le monde a gagné, car tout le monde a participé à cette belle fête de l’amitié. D’abord tous les joueurs copains du club : Loïc, Wesley, Fabrice, Maxime, Jean-Philippe, Quentin, Luther, Sylvain et Samuel, ainsi que leurs parents. Et tous ceux que la fraternité du sport nous a permis de connaître, telle Marie-Angélique Roselle, et tous ceux qui viendront jouer bientôt en compétition, tel Roger qui est venu à la remise des prix ! Et tous ceux qui auraient dû être là , comme Emma, mais on lui pardonne car le basket aussi est un sport magnifique.

En conclusion, je conterai une anecdote de ma jeunesse. Ma bande de copains avait proposé au patron du « Koskera », pendant les fêtes de Bayonne, de l’aider à monter sa terrasse. Le parasol gigantesque dont s’occupait Gilles s’était effondré dans une avalanche de vaisselle et de vin rouge. « Je suis désolé, je ne suis pas un manuel », avait dit Gilles debout au milieu du désastre, avec le ton que John Wayne utilise quand il affirme à Lee Marvin : « c’était mon steak, Valance ».

Un long silence se fit. Puis le patron, une louche de haricots tarbais à la main, répondit à Gilles : « Comme tu n’as pas une tête d’intellectuel, je me demande qui tu es ! ».

Il mettait le doigt sur une question primordiale, qui taraude l’humanité depuis la grotte de Lascaux. Qui suis-je ?

C’est la question que Beth Harmon, une ex-petite fille jetée dans un orphelinat par le hasard d’un accident de la route, essaie de résoudre grâce au jeu d’échecs, ce jeu où le hasard n’intervient pas.
Le « Je » de la Dame.
Et nous, futurs Carlsen, comme la championne du célèbre roman de Tavis, avec beaucoup d’amitié et de gaieté, nous nous tenons debout dans un monde de parasols effondrés.

À la question « Qui suis-je ? », nous savons quoi répondre : Nous sommes les meilleurs copains du monde.

À bientôt, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes !

Jean-Michel Labourdique

Open de Pâques de Saint-Macaire, du 19 au 21 avril 2025

Fiche du tournoiClassement

Avec du Tai Chi

Avec du Tai Chi

« Avec du Tai-chi et une bonne respiration, affirme Christophe, tu joues tout de suite mieux. »

J’ai pensé ça juste avant la ronde 1 en m’asseyant devant Christophe. J’ai descendu mes omoplates, gonflé mes poumons, posé mes paumes à plat sur la table, en écartant bien les doigts, et j’ai regardé Christophe en souriant.

Eh bien, Christophe, ça ne marche pas !
« Tu as bien joué », a dit Christophe, après avoir pulvérisé mon Système Botvinnik.
« Oui, mais pas très longtemps », ai-je répondu.

Dehors, quand j’ai demandé à Jean-Philippe à quoi il attribuait sa première défaite, il a dit, laconiquement : « à Wesley. »

À la ronde 2, Maxime est arrivé en finale Cavalier-Fou contre Cavalier, puis il a perdu son Fou sur une fourchette, mais a fini par gagner la partie. Bravo !

À la ronde 3, j’ai réussi à faire nulle contre Fabrice, qui avait 3 pions pour la pièce. Luther a joué la Sicilienne, Ulysse l’Écossaise, sans succès.

À la ronde 4, j’ai encore une fois perdu devant la pseudo-Rossolimo de Wesley. Luther a rapidement fait jouer toutes ses pièces et a réussi un très beau mat. Jean-Philippe s’est vite retrouvé en mauvaise posture, avec des pions isolés doublés et un roi au centre. Mais, après l’échange des Dames, sa structure de pions s’est révélée très bonne, et son roi hyperactif.

Après un repas au sandwich-ventrèche très sympa, la ronde 5 a débuté. Maxime a rapidement gagné, après avoir sacrifié un pion du centre pour avoir l’activité. Je suis alors parti à la buvette. Marie-Angélique a confié à la presse une plainte unanime, il fallait faire des kilomètres à pied dans les caves pour chercher les bouteilles de soda. « On a fait la même critique au tournoi d’octobre, rien n’a changé, le patronat reste indifférent à nos revendications », a ajouté Barbara, fort mécontente.

Après la ronde 6, j’ai voulu connaître le point de vue des papas. « C’est chaud pour les gamins, le niveau est relevé, c’est un bon entraînement pour les Championnats d’Aquitaine Individuels Jeunes qui auront lieu à Saint-Macaire », a dit Arnaud. Stéphane a dit la même chose.

Enfin, après la ronde 7, j’ai dit à Wesley que le personnel de la buvette m’avait fait part de ses récriminations. Wesley a dit que ouais, c’était vrai, c’était Germinal, mais en pire.

À demain, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes !

Jean-Michel Labourdique

Coupe de Gironde – Phase qualificative – 15/02/2025 à Blésignac :

Fiche du tournoiClassementGrille américaine

Coupe de Gironde – Phase finale – 16/02/2025 à Blésignac :

Tableau des résultats

Ça sera moins glamour

Ça sera moins glamour

Il y a quelques années, début octobre, nous jouions contre l’Échiquier Arcachonnais. Par les baies vitrées de la salle de jeu, les joueurs admiraient les focs blancs picorant les prés bleus du Bassin. En attendant la fin des parties, les papas et les mamans s’étaient dispersés sur les plages et les terrasses des cafés.

En revenant aux voitures, une maman demanda :

– Où aura lieu la prochaine ronde ?

– À Libourne, en novembre, à côté du Lavauto de l’hypermarché.

– Ça sera moins glamour, soupira-t-elle.

Hier, come-back à Libourne ! Et, comme autrefois, ce fut moins glamour ! Le ciel bas et lourd pesait comme un couvercle, et on n’y décelait pas des vols de mouettes, mais des hordes de corbeaux, les tristes messagers d’Odin, le dieu scandinave des combats dans le froid.

Eh bien, la beauté n’était pas dans le paysage ! Elle était dans le sourire et l’accueil chaleureux de nos amis libournais ! Comme le dit le poète, ou à peu près, les gens du nord de la Gironde ont dans les yeux le bleu qui manque à leur décor. Le glamour est anecdotique. Parlons échecs maintenant !

La ronde 1 a été triomphale. Wesley a pu s’enorgueillir de sa technique en finale, Emma a offert un pion empoisonné qui a été gobé, Faustin a déclenché sa Caro-Kann et Liam a fait fructifier ses pions passés en échangeant tout.

La ronde 2 a été épique. Maxime, grâce a des Cavaliers déchaînés, a battu un 2000 Elo, pendant que Faustin arrachait le match nul a un plus de 2000 Elo.

À la ronde 3 a eu lieu un duel Maxime-Wesley ! Wesley, grâce à sa technique en finale légendaire, a gagné. On ne bat pas le Prof.

À la ronde 4, Faustin a montré qu’il tutoierait bientôt les étoiles, puisque son adversaire s’était préparé à contrer son ouverture favorite. Si jeune, et déjà redouté !

À la ronde 5, Wesley gagne avec un pion de moins en finale de Tours !

À la ronde 6, j’ai eu le plaisir d’affronter l’ex-président du club d’échecs de Libourne, M. Gregory, et nous étions si contents de nous retrouver là que le match nul a satisfait tout le monde.

À la ronde 7, Liam a fait preuve d’un magnifique sang-froid. Il arrive à gagner à la pendule, alors qu’il lui restait 7 secondes et qu’il restait plus de 2 minutes à son adversaire !

Les rondes 8 et 9 se sont déroulées en un tourbillon !

Le bilan

Emma, la meilleure féminine !
Faustin et Quentin, les meilleurs dans leur catégorie Elo !
Et Wesley, médaille de Bronze, après un duel avec Matthieu Cornette, champion de France !

A bientôt, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes !

Jean-Michel Labourdique

13e Open des Vendanges de Libourne, 15 décembre 2024

ClassementGrille américaine


Chez les Cheminots

Chez les Cheminots

« Je suis pris dans un piège, le piège intemporel que les gares nous tendent immanquablement. Une fine poussière de charbon flotte encore dans l’air autour des gares tant d’années après que les lignes ont toutes été électrifiées ».
J’ai pensé à ces lignes d’Italo Calvino en entrant dans la salle de jeu de l’ASPOM, qui est aussi la cantine des cheminots de Bordeaux, coincée entre la rue de l’Atelier et la rue de la Compagnie du Midi. Aux murs, de belles photos décrivent les grandes heures du syndicalisme, de la résistance, des grèves de 1947. Non loin, quatre citernes gigantesques, perchées sur une maçonnerie du Second Empire, rappellent que les locomotives roulaient au charbon au temps de Napoléon III.

Dès l’entrée, un flipper des années 50 donne le la : « Lethal Combat ». Quelle arme mortelle devrai-je utiliser pendant ces trois jours de combat ? L’Espagnole ? La Sicilienne ? Le Gambit Owen ?

Je feuillette les livres de la petite bibliothèque près de la buvette, magnifiquement achalandée par les cheminots. Je trouve un ouvrage sur la Grèce Antique, superbement illustré. Je l’ouvre au hasard, espérant trouver, comme les Grecs à Delphes, un oracle. Je tombe sur une biographie de Périclès : « On ne pouvait rester insensible à son visage empreint de noble gravité, tempéré par un fin sourire. »

Voilà la clé d’une victoire glorieuse, comme à Salamine ! Jean-Michel « pokerface » Labourdique. Leitmotiv : n’offrir à mes adversaires qu’un visage imperturbable, impénétrable. Ne parler, rarement, que par litotes. N’être excessif que dans la retenue.

Les copains sont arrivés, et mes résolutions en ont pris un coup.

Résumons, pour chaque copain de Créon, en quelques lignes, ces trois jours de tournoi.

Faustin a montré sa virtuosité en finale, avec des mats rapides et sobres. Il était content de son tournoi, une préparation pour les compétitions futures.

Maxime était lui aussi satisfait de son tournoi. Il a démontré qu’il était bien un joueur d’attaque, capable de beaux sacrifices sur le roque adverse.

Emma, comme ses camarades, a montré le sérieux d’une vraie championne. Une double championne d’ailleurs, puisqu’elle a obtenu un congé de l’arbitre, pour aller disputer une partie de basket à l’autre bout de Bordeaux pendant la ronde 2, avant de revenir pour la ronde 3 et gagner.

Wesley, en bon professeur, a montré à ses élèves du samedi qu’il pratiquait ce qu’il enseignait, sacrifiant sa tour sur le roque adverse pour mettre à sa merci le Roi ennemi.

Enfin, j’ai essayé d’obtenir de Jean-Philippe quelques informations sur son jeu, mais il a haussé les épaules. « Parle de ce qui est important : le Far Breton ». La cuisinière du Far, qui tenait la buvette, l’écoutait, radieuse. Nous avons alors entamé une longue conversation gastronomique qui s’est conclue avec la recette du Pot-au-Feu d’Hélène Darroze et – je dois mettre des majuscules – l’Os à Moelle. La Dame de Fer sera peut être oubliée par l’Histoire, mais je n’oublierai jamais la Dame du Far. Je suis parti jouer la ronde suivante en rêvant d’Os à Moelle, malgré ce que j’avais avalé, et c’est la faim au ventre que je me suis assis devant l’échiquier. C’est pour ça que j’ai perdu. J’avais faim.

A bientôt, les futurs Carlsen ! Mangez des pâtes !

Jean-Michel Labourdique

8e Open Jean Mandouze, Bordeaux ASPOM Échecs, du 9 au 11 novembre 2024

ClassementGrille américaine